Un nouveau virus géant découvert dans le permafrost sibérien
Des chercheurs du laboratoire Information génomique et structurale (CNRS/Aix-Marseille Université), du laboratoire Biologie à grande échelle1(CEA/Inserm/Université Joseph Fourier) et du Genoscope1 (CNRS/CEA) viennent de découvrir un virus géant d'un genre totalement nouveau, dans le même échantillon de permafrost2 de Sibérie, datant de 30 000 ans, d'où avait déjà été isolé Pithovirus3. Microscopie, génomique, transcriptomique, protéomique et métagénomique4, ont permis aux chercheurs de dessiner un portrait détaillé de ce nouveau virus, baptisé5 Mollivirus sibericum. Ces travaux sont publiés dans PNAS le 7 septembre 2015.
Après les Megaviridae (représentées par Mimivirus découvert en 2003), les Pandoraviridae (découverts en 2013) et le Pithovirus (décrit en 2014), c'est désormais une quatrième famille de virus géants, infectant les amibes du genre acanthamoeba, qui a été mise au jour par l'équipe de chercheurs à l'origine de la découverte de Pithovirus. C'est en persévérant dans l'étude de l'échantillon de sol gelé en provenance de l'extrême Nord-Est sibérien, dans lequel avait déjà été trouvé le Pithovirus, que les chercheurs ont isolé, amplifié, puis caractérisé ce nouveau virus,Mollivirus sibericum. C'est la première fois que toutes les techniques d'analyses du vivant, génomique, transcriptomique, protéomique et métagénomique, ont été utilisées simultanément pour caractériser un virus.
Ce virus se présente comme une coque oblongue d'environ 0,6 μm de long renfermant un génome d'environ 650 000 paires de base codant pour plus de 500 protéines. La plupart de ces protéines n'ont pas la moindre ressemblance avec celles de son prédécesseur sibérien, Pithovirus sibericum. De plus, à l'opposé de Pithovirus, qui n'a besoin que des ressources du cytoplasme de son hôte cellulaire pour se multiplier, Mollivirus sibericumutilise le noyau cellulaire pour se répliquer6 dans l'amibe ce qui le rend aussi dépendant de son hôte que la plupart des "petits" virus. Cette stratégie et d'autres caractéristiques spécifiques, comme un déficit en certaines enzymes clés permettant la synthèse des briques de base de son ADN, rapproche Mollivirus sibericum des types de virus courants parmi les pathogènes humains comme les Adénovirus, les Papillomavirus, ou les Herpesvirus. De son coté, Pithovirus se multiplie dans le cytoplasme, à la façon des Poxvirus, famille à laquelle appartient le virus responsable de la variole, officiellement éradiqué. Forme, mode de réplication, métabolisme : Mollivirus sibericum représente bien une nouvelle famille de virus distincte des trois familles de virus géants déjà répertoriées. Un nouveau type de virus qui n'avait jamais été observé auparavant.
Ce virus se présente comme une coque oblongue d'environ 0,6 μm de long renfermant un génome d'environ 650 000 paires de base codant pour plus de 500 protéines. La plupart de ces protéines n'ont pas la moindre ressemblance avec celles de son prédécesseur sibérien, Pithovirus sibericum. De plus, à l'opposé de Pithovirus, qui n'a besoin que des ressources du cytoplasme de son hôte cellulaire pour se multiplier, Mollivirus sibericumutilise le noyau cellulaire pour se répliquer6 dans l'amibe ce qui le rend aussi dépendant de son hôte que la plupart des "petits" virus. Cette stratégie et d'autres caractéristiques spécifiques, comme un déficit en certaines enzymes clés permettant la synthèse des briques de base de son ADN, rapproche Mollivirus sibericum des types de virus courants parmi les pathogènes humains comme les Adénovirus, les Papillomavirus, ou les Herpesvirus. De son coté, Pithovirus se multiplie dans le cytoplasme, à la façon des Poxvirus, famille à laquelle appartient le virus responsable de la variole, officiellement éradiqué. Forme, mode de réplication, métabolisme : Mollivirus sibericum représente bien une nouvelle famille de virus distincte des trois familles de virus géants déjà répertoriées. Un nouveau type de virus qui n'avait jamais été observé auparavant.
Cette découverte, qui suggère que les virus géants ne sont pas rares et sont très diversifiés, prouve aussi que la capacité des virus à survivre dans le permafrost sur de très longues périodes n'est pas limitée à un type particulier de virus, mais couvre probablement des familles virales aux stratégies de réplication très variées et donc potentiellement pathogènes. Les résultats de l'analyse métagénomique de cet échantillon de permafrost, qui montre une concentration extrêmement faible du Mollivirus (de l'ordre de quelques parties par million), ont aujourd'hui des implications importantes en termes de santé publique. Quelques particules virales encore infectieuses peuvent en effet être suffisantes, en présence de l'hôte sensible, à la résurgence de virus potentiellement pathogènes dans les régions arctiques de plus en plus convoitées pour leurs ressources minières et pétrolières et dont l'accessibilité et l'exploitation industrielle sont facilitées par le changement climatique.
Afin de déterminer si d'autres virus géants se cachent encore dans le permafrost, les chercheurs étudient7 désormais des couches plus anciennes du sol sibérien, dans une région qui devrait leur permettre d'atteindre - 1 million d'années.
© IGS CNRS/AMU
Microscopie électronique à balayage des particules des 4 familles de virus géants désormais connues. Les plus grandes dimensions vont approximativement de 0,6 micron (Mollivirus) à 1,5 micron (Pandoravirus)
Sur le même sujet :
Communiqués de presse :
Découverte d'un nouveau type de virus géant âgé de plus de 30 000 ansPandoravirus : découverte d'un chaînon manquant entre le monde viral et le monde cellulaire
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Article du CNRS le journal : Le mystère des virus géants
Notes :
1 De l'Institut de recherche en technologies et sciences pour le vivant (CEA-IRTSV), de l'Institut de génomique (CEA-IG).
2 Couche de sol gelé en permanence des régions arctiques, aussi appelée "pergélisol".
3 Voir en fin de communiqué : un communiqué de presse de 2014 sur la découverte du Pithovirus.
4 Ces techniques sont appelées « approches omiques ». Elles permettent d'appréhender la complexité du vivant dans son ensemble, à l'échelle d'un organisme et se déclinent en "génomique" (étude du génome), "transcriptomique" (étude de l'expression des gènes), "protéomique" (étude de la composition en protéines) ou à l'échelle d'un écosystème entier (sol, air, océans, intestin), pour la "métagénomique" (diversité des génomes).
5 Mollivirus vient du latin Mollis, signifiant flexible. Ce virus a en effet la particularité d'être déformable une fois dans le milieu cellulaire.
6 La réplication virale est l'ensemble des processus qui se déroulent dans la cellule infectée par un virus et qui ont pour effet de produire de nouvelles unités de ce virus (ou virions).
7 Avec le soutien des infrastructures nationales France-Génomique ProFi (Investissements d'avenir).
2 Couche de sol gelé en permanence des régions arctiques, aussi appelée "pergélisol".
3 Voir en fin de communiqué : un communiqué de presse de 2014 sur la découverte du Pithovirus.
4 Ces techniques sont appelées « approches omiques ». Elles permettent d'appréhender la complexité du vivant dans son ensemble, à l'échelle d'un organisme et se déclinent en "génomique" (étude du génome), "transcriptomique" (étude de l'expression des gènes), "protéomique" (étude de la composition en protéines) ou à l'échelle d'un écosystème entier (sol, air, océans, intestin), pour la "métagénomique" (diversité des génomes).
5 Mollivirus vient du latin Mollis, signifiant flexible. Ce virus a en effet la particularité d'être déformable une fois dans le milieu cellulaire.
6 La réplication virale est l'ensemble des processus qui se déroulent dans la cellule infectée par un virus et qui ont pour effet de produire de nouvelles unités de ce virus (ou virions).
7 Avec le soutien des infrastructures nationales France-Génomique ProFi (Investissements d'avenir).
Références :
In-depth study of Mollivirus sibericum, a new 30,000-y old giant virus infecting Acanthamoeba. Matthieu Legendre, Audrey Lartigue, Lionel Bertaux, Sandra Jeudy, Julia Bartoli, Magali Lescot, Jean-Marie Alempic, Claire Ramus, Christophe Bruley, Karine Labadie, Lyubov Shmakova, Elizaveta Rivkina, Yohann Couté, Chantal Abergel, Jean-Michel Claverie. PNAS, 7 septembre 2015.
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