dimanche 20 octobre 2019

Les personnes atteintes de tumeurs cérébrales présentent une gamme de symptômes dont la gravité peut varier, allant de maux de tête à un déclin des fonctions cognitives. Les symptômes dépendent du type de tumeur, de sa taille, de son emplacement et de son rythme de croissance. Comprendre ce qui contrôle la vitesse de croissance des tumeurs cérébrales pourrait donc aider à mettre au point des traitements qui ralentissent la progression du cancer et améliorent la qualité de vie des patients. Trois équipes rapportent aujourd’hui dans une série d’articles publiés dans Nature que, dans le cerveau, les cellules cancéreuses forment avec les neurones des connexions, ou synapses, et que cette connexion favorise la croissance tumorale.
https://www.pourlascience.fr/theme/cancer/liaisons-dangereuses-les-cellules-tumorales-forment-des-synapses-avec-les-neurones-18093.php?fbclid=IwAR3Q8AYDA9DZnL_07iRnCUaOHFxnASQD5EWpOFsDhvX11RzWV4sI82ILIPQ


Une synapse est une structure dans laquelle deux neurones adjacents communiquent en utilisant des molécules de neurotransmetteur, habituellement le glutamate. La libération de glutamate par le neurone présynaptique active les récepteurs de glutamate, appelés récepteurs AMPA et récepteurs NMDA, sur le neurone postsynaptique. L’activation des récepteurs provoque le passage d’ions à travers la membrane cellulaire, ce qui produit une dépolarisation – une augmentation de la charge positive à l’intérieur du neurone postsynaptique, qui entraîne une excitation. D’autres types de cellules, les cellules gliales, entourent la synapse et régulent la transmission du signal en éliminant le neurotransmetteur libéré. Certaines cellules gliales affectent « l’excitabilité » du neurone en régulant la concentration des ions potassium à l’extérieur de la cellule.
Les cellules gliales peuvent donner naissance à un type de tumeur cérébrale appelée « gliome », qui est la principale cause de décès par cancer du cerveau aux États-Unis. Une caractéristique commune à de nombreux types de gliomes est que leur croissance nécessite l’activité des cellules neuronales voisines, mais on ignorait pourquoi jusqu’à présent.
Les cellules gliales saines forment des réseaux cellulaires interconnectés. En effet, des structures sur la membrane des cellules gliales, appelées « jonctions interstitielles », permettent aux molécules de signalisation, comme les ions calcium, de se déplacer dans les cellules gliales voisines. Les cellules de gliome forment également des réseaux cellulaires interconnectés par des jonctions interstitielles appelées microtubules tumoraux – de longues et fines protubérances de la membrane cellulaire qui s’étendent dans les tissus environnants et contribuent à l’infiltration et à la prolifération de la tumeur.
Varun Venkataramani, de l’Institut d’anatomie et de biologie cellulaire de l’université de Heidelberg, et ses collègues ont examiné par microscopie électronique des microtubules tumoraux formés par des gliomes humains qui avaient été transplantés dans le cerveau de souris. Ils ont remarqué que ces microtubules présentent à leur extrémité un épaississement caractéristique des synapses excitatrices, appelé densité postsynaptique, où se trouvent habituellement les récepteurs du glutamate. Dans les neurones voisins, adjacents à ces densités postsynaptiques, les chercheurs ont observé des amas de vésicules qui stockent des neurotransmetteurs, qui sont une caractéristique d’une région présynaptique d’un neurone. L’équipe de Humsa Venkatesh, du département de neurologie de l’université de Californie à Stanford, a observé des structures similaires entre des cellules de gliome et des neurones.

Les deux équipes ont montré que les gènes des récepteurs du glutamate et des composants structuraux de la région postsynaptique sont exprimés dans une partie des cellules des gliomes humains, ce qui suggère que les cellules gliomes exploitent les mêmes mécanismes moléculaires que les neurones pour établir des synapses. Pour déterminer si ces synapses entre les cellules tumorales et les neurones fonctionnent de la même manière que celles reliant les neurones, les deux groupes ont transplanté des cellules de gliome humain dans le cerveau de souris. La stimulation des neurones proches des cellules de gliome a provoqué une brève dépolarisation dans certaines de ces dernières ; dépolarisation caractéristique des synapses excitatrices et qui mettait en jeu les récepteurs AMPA. Fait intéressant, le type de récepteur AMPA exprimé dans ces cellules de gliome a des propriétés pharmacologiques différentes de celles des récepteurs AMPA exprimés dans les neurones, ce qui en fait un candidat prometteur comme cible thérapeutique. Dans certaines autres cellules de gliome, les biologistes ont observé un courant dépolarisant de longue durée qui s’amplifiait et se propageait à travers les jonctions interstitielles vers les cellules tumorales connectées. Ce courant prolongé n’était pas d’origine synaptique, mais semblait plutôt provenir de changements dans la concentration extracellulaire en ions potassium en raison de l’activité neuronale.

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