mardi 12 septembre 2017

Des « legos » cellulaires magnétiques pour la médecine régénérative de demain

Grâce à l'incorporation de nanoparticules magnétiques dans les cellules et à la mise au point d'un dispositif comprenant des aimants miniaturisés, des chercheurs du laboratoire Matière et systèmes complexes (CNRS/Université Paris Diderot), en collaboration avec le laboratoire Adaptation biologique et vieillissement (CNRS/UPMC) et le Centre de recherche cardiovasculaire de Paris (Inserm/Université Paris Descartes), ont créé de véritables « legos » cellulaires magnétiques. Ils sont parvenus à agréger des cellules sans matrice de soutien externe, uniquement avec l'aide d'aimants. De cette manière, le tissu formé par les cellules peut être déformé à loisir. Décrit dans Nature Communications le 12 septembre 2017, ce dispositif pourrait se révéler être un outil puissant aussi bien pour des études biophysiques que pour la médecine régénérative de demain.

Les nanotechnologies ont rapidement envahi le secteur médical en proposant des solutions parfois inédites aux limites des traitements actuels, devenant ainsi incontournables pour le diagnostic et la thérapie, notamment pour la régénération des tissus. L'un des défis actuels de la médecine régénérative est de pouvoir créer un assemblage cellulaire cohésif et organisé tout en s'affranchissant d'une matrice de soutien externe. Ce défi est particulièrement considérable lorsqu'il s'agit de synthétiser des tissus épais et/ou de grandes tailles, ou lorsque ces tissus doivent être stimulés, à la manière de leurs homologues in vivo (comme par exemple le tissu cardiaque ou le cartilage), afin d'améliorer leur fonctionnalité.

Des chercheurs ont relevé ce défi en exploitant le magnétisme pour agir à distance sur les cellules, les assembler, les organiser et les stimuler. Les cellules, briques élémentaires du tissu, sont ainsi magnétisées au préalable, via l'incorporation de nanoparticules magnétiques, pour devenir de véritables « legos » cellulaires déplaçables et empilables grâce à des aimants externes. Dans ce nouveau dispositif d'étireur tissulaire magnétique, les cellules magnétisées sont d'abord piégées sur un premier micro-aimant, puis l'agrégat formé par les cellules est piégé à son tour par un second aimant, mobile cette fois. Le mouvement des deux aimants permet d'étirer ou de comprimer à volonté le tissu obtenu.

Pour tester leur dispositif, les chercheurs ont d'abord utilisé des cellules souches embryonnaires. Ils ont commencé par montrer que l'incorporation de nanoparticules n'avait d'impact ni sur le fonctionnement de la cellule souche, ni sur ses capacités de différenciation. Ces cellules souches magnétiques fonctionnelles ont ensuite été testées dans l'étireur. De manière remarquable, elles se différencient vers des précurseurs de cellules cardiaques lorsque la stimulation impose des « battements magnétiques » mimant la contraction du cœur. Ce résultat montre ainsi le rôle que peuvent avoir des facteurs purement mécaniques dans la différenciation cellulaire.

Cette approche « tout-en-un » qui permet dans un même dispositif de façonner un tissu et de le manipuler, pourrait ainsi se révéler être un outil puissant aussi bien pour des études biophysiques que pour l'ingénierie tissulaire.

Legos cellulaires
© Claire Wilhelm / laboratoire Matière et systèmes complexes (CNRS/Université Paris Diderot).
L'étireur magnétique : ce dispositif tout-en-un permet à la fois de former et de stimuler mécaniquement un agrégat de cellules souches embryonnaires. Les deux micro-aimants, dont l'un est mobile, encadrent le corps embryoïde obtenu et la stimulation cyclique peut être adaptée selon le type de tissu que l'on souhaite obtenir.



Télécharger le communiqué de presse : CP Legos cellulaires


Références :

A 3D magnetic tissue stretcher for remote mechanical control of embryonic stem cell differentiation. Vicard Du, Nathalie Luciani, Sophie Richard, Gaëtan Mary, Cyprien Gay, François Mazuel, Myriam Reffay, Philippe Menasché, Onnik Agbulut, Claire Wilhelm. Nature communications, le 12 septembre 2017. DOI : 10.1038/s41467-017-00543-2. Consulter le site web
 

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