samedi 10 mars 2018

la spéciation chez les Equidés

Les Equidés représentent 55 millions d'années de changements anatomiques, qui va de l'ancêtre aux 3 à 4 doigts à l'ongulé actuel possédant un seul et unique doigt. De cette famille ne subsiste aujourd'hui que le genre « Equus », apparu il y a 4 à 4,5 millions d'année en Amerique du Nord. Ce genre abrite les espèces telles que le cheval (equus caballus), l'âne (equus asinus), le zèbre (equus quagga ou zebra) mais encore l'hémione (equus hemionus) ou le cheval de Przewalski (equus ferus przewalskii).
Les espèces de ce genre sont de la classe « Mammalia » (mammifères) et se caractérisent par une taille moyenne ou grande, une tête allongée et un coup long orné d'une crinière.

Ces espèces représentent un exemple frappant de modèle d'évolution, mais le mystère de leur grande diversité reste un sujet d'actualité.

Les nombreuses recherches menées sur le génome des espèces actuelles d'équidés ainsi que, plus récemment, sur le génome du zèbre quagga, éteint au début du XXeme siècle, mettent en évidence la complexité de l'histoire de la spéciation chez les Equus.
C'est la comparaison des génômes des différentes espèces d'Equus qui permet entre autre de décrypter les adaptations génétiques et de retracer le moment où deux espèces distinctes sont apparues sous l'influence de différents facteurs, ce qu'on appelle spéciation.
Les chercheurs, en séquençant les 6 génomes de chaque espèce vivante d'ânes et de zèbres ont élargit les bases de données et ont pu comparer ces séquences avec celles du cheval et de l'âne domestiques, qui étaient jusque-là les seules à avoir été séquencées entièrement : ils ont ainsi mis en évidence 48 gènes qui ont évolué différemment ; gènes impliqués entre autre dans l'olfaction, les réponses immunitaires, le développement, la locomotion ou encore le comportement.
Il est d'usage de penser que la spéciation chez les Equus a débuté par un isolement géographique de par la large expansion que l'ancêtre commun a connu dès son apparition il y a environ 4 millions d'années. En effet, l'histoire démographique de ce genre a été très active. L'évolution s'est faite principalement en Amérique du Nord, puis les représentants du genre se sont dirigés vers l'Europe et l'Asie par migrations (dès 2,1 – 3,4 Ma). La plus ancienne spéciation a eu lieu en Amérique du Nord. Cette très grande dispersion est à l'origine des spéciations.
L'isolement géographique est vecteur d'adaptations génétiques et phénotypiques chez l'individu, adaptations qui favorisent l'appréhension de l'environnement, de l'écosystème, la survie et la reproduction. A plus ou moins long terme, ces divergences génétiques et phénotypiques (quoique moindres) ont « isolé » un groupe d'équidés par rapport à un autre, entraînant un isolement génétique et donc, un isolement reproductif. Les espèces d'Equus sont donc nées du fait de la large diffusion de ce genre animal sur le globe.C'est le cas par exemple du zèbre, espèce présente principalement sur le continent africain, qui s'est remarquablement bien adapté à son environnement aride et riche en insectes.


Isolement reproductif ? En vérité pour les espèces du groupe Equus, ce n'est pas vraiment le cas. Ce qui est complexe dans le cas des différentes espèces d'Equus, c'est qu'il existe aujourd'hui beaucoup de cas d'hybridation malgré des différences chromosomiques majeures en fonction des espèces du genre (de 16 à 32 paires selon les espèces), ce qui contraste avec la théorie selon laquelle les incompatibilités chromosomiques sont les moteurs de la spéciation équine. On veut dire par là que malgré un nombre très variable de paires de chromosomes chez les différentes espèces d'Equus, il est possible de trouver de fortes ressemblances dans le génomes des espèces équines actuelles, ce qui vient s'opposer à l'idée que l'accumulation de réarrangements chromosomiques mène à une isolation reproductive complète. Ceci remet en cause le critère d'interfécondité utilisé pour définir une espèce, puisque le terme même d'hybridation vient s'y opposer : il définit le croisement entre deux espèces. Des espèces qui, normalement, ne devraient pas pouvoir se reproduire car trop éloignés que ce soit sur le point de vue génétique et/ou géographique. Chez les Equus cependant, les cas d'hybridation nombreux suggèrent une proximité des génomes plus importante que ne le laisserait penser certaines études.

Si nous prenons le cas du mulet (ou de la mule) par exemple, équidé hybride issu des amours d'un âne et d'une jument, des études de son caryotype ont permis de le comparer avec ceux de ses parents. D'un phénotype nettement hybride, alliant la taille et l'étendue du cheval et les caractéristiques de l'âne, le mulet est également d'un point de vue physiologique très proche de l'âne : c'est en effet un animal très robuste. D'un point de vue génétique, le caryotype du mulet possède 63 chromosome : un parfait mélange entre son parent maternel et paternel qui en possèdent respectivement 64 (cheval) et 62 (âne).
Cette hybridation est possible car si le caryotype du cheval et de l'âne diffèrent ne serait-ce que de par leurs réarrangements chromosomiques, ils restent cependant très proches.
D'autres cas d'hybridation sont bien connues : le zébrule entre autre, issu du croisement d'un zèbre et d'une jument, le zébrâne venant de l'accouplement d'un zèbre et d'une anesse ou encore le bardot issu d'une anesse et d'un étalon.
Tous ces hybrides possèdent également 63 chromosomes. Ce nombre impair de chromosomes hérités de leurs parents équins entraînent fatalement leur stérilité : ne pouvant s'apparier correctement lors de la première division de la méiose, les cellules germinales de l'animal sont vouées à se dégénérer ; ces irrégularités d'appariement provoquent une très faible production de gamètes viables qui sont, de plus, difficilement fécondables.

Ces cas d'hybridation montrent la grande plasticité chromosomique chez les espèces Equus, capables pour la plupart de se reproduire entre elles. Cependant, cette descendance, stérile, corrobore le fait que le cheval et l'âne, le cheval et le zèbre ou encore le zèbre et l'âne restent des espèces différentes quoique très proches, issue d'un ancien et même ancêtre commun.















L'évolution du genre Equus a comme tous été l'objet d'une longue et lente évolution. Elle est très intéressante à étudier car les espèces équines représentent un modèle fondamental pour la compréhension du lien réciproque entre structure chromosomique et diversité génétique qui mènent finalement à la spéciation au sein d'un genre.





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