2/ Séquençage génomique et bioinformatique
Séquençage et bioinfo en Video INSERM 3’54 : https://youtu.be/TCnG7R50IlU
Le séquençage de l'ADN est inventé dans la deuxième moitié des années 1970. Deux méthodes sont développées indépendamment, l'une par l'équipe de Walter Gilbert, aux États-Unis, et l'autre par celle de Frederick Sanger (en 1977), au Royaume-Uni. Ces deux méthodes sont fondées sur des principes diamétralement opposés : l'approche de Sanger est une méthode par synthèse enzymatique sélective, tandis que celle de Maxam et Gilbert est une méthode par dégradation chimique sélective.
La méthode de Maxam et Gilbert nécessite des réactifs chimiques toxiques et reste limitée quant à la taille des fragments d'ADN qu'elle permet d'analyser (< 250 nucléotides). Moins facile à robotiser, son usage est devenu aujourd'hui confidentiel.
Au cours des 25 dernières années, la méthode de Sanger a été largement développée grâce à plusieurs avancées technologiques importantes :
la mise au point de vecteurs de séquençage adaptés, comme le phage M13 développé par Joachim Messing au début des années 1980 ;
le développement de la synthèse chimique automatisée des oligonucléotides qui sont utilisés comme amorces dans la synthèse ;
l'introduction de traceurs fluorescents à la place des marqueurs radioactifs utilisés initialement. Ce progrès a permis de sortir le séquençage des pièces confinées nécessaires à l'usage de radio-isotopes ;
l'adaptation de la technique PCR pour le séquençage ;
l'utilisation de séquenceurs automatiques de gènes ;
l'utilisation de l'électrophorèse capillaire pour la séparation et l'analyse.
Sanger method in video : https://youtu.be/-QIMkQ4E_wE
La génomique est une discipline de la
biologie
moderne. Elle étudie le fonctionnement d'un organisme, d'un organe,
d'un cancer, etc.
à l'échelle du génome,
au lieu de se limiter à l'échelle d'un seul gène.
La génomique se divise en deux branches :
La génomique structurale, qui se charge du séquençage du génome entier ;
La génomique fonctionnelle, qui vise à déterminer la fonction et l'expression des gènes séquencés en caractérisant le transcriptome et le protéome.
La bio-informatique, ou bioinformatique, est un champ de recherche multi-disciplinaire de la biotechnologie où travaillent de concert biologistes, chimistes, médecins, informaticiens, mathématiciens, physiciens et bio-informaticiens, dans le but de résoudre un problème scientifique posé par la biologie. Plus généralement, la bio-informatique est l'application de la statistique et de l'informatique à la science biologique. Le spécialiste qui travaille à mi-chemin entre ces sciences et l'informatique est appelé bio-informaticien ou bionaute. Ce domaine s'étend de l'analyse du génome à la modélisation de l'évolution d'une population animale dans un environnement donné, en passant par la modélisation moléculaire, l'analyse d'image, l'assemblage de génome et la reconstruction d'arbres phylogénétiques (phylogénie). Cette discipline constitue la « biologie in silico », par analogie avec in vitro ou in vivo.
Le développement des techniques de séquençage de l’ADN et les progrès de la bioinformatique donnent directement accès au génôme de chaque individu comme à ceux de ses ascendants et descendants.
3/ Maladie & thérapie gén(et)ique
Recenser des informations sur les nombreux mutants du gène de la mucoviscidose et les analyses prédictives qui peuvent être conduites.
La mucoviscidose est une des maladies génétiques potentiellement graves les plus fréquentes en France et dans les pays occidentaux. Elle touche surtout les fonctions digestives et respiratoires. Ses symptômes invalidants et les complications infectieuses et fonctionnelles qui en découlent impactent l’espérance de vie des patients.
6 000 malades en France en 2020
200 nouveaux-nés chaque année
= 1 /4 500 en moyenne
1 /3 000 en Bretagne
1 /8 000 en Languedoc-Roussillon
Espérance de vie :
5 ans en 1960
40 ans en 2020
L’épais mucus qui encombre les bronches entraîne en premier lieu l’installation d’une bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) qui épuise progressivement les capacités respiratoires du patient, entraînant à terme une insuffisance respiratoire.
Le mucus présent dans les bronches fait également le lit d’infections bactériennes fréquentes et spécifiques par Staphylococcus aureus (staphylocoque doré), Haemophilus influenzae ou encore Pseudomonas aeruginosa.
Dès 1953 une concentration anormalement élevée du chlore et du sodium était mesurée dans la sueur.
la protéine CFTR est associée aux canaux transporteurs d'ions chlore et sodium
Le dysfonctionnement de ces canaux s'explique par la présence de la protéine CFTR modifiée chez les malades. L'épithélium respiratoire produit un mucus anormal et les glandes sudorales une sueur plus salée que la normale
la protéine CFTR (Cystic fibrosis transmembrane conductance regulator)
présente dans la membrane des cellules de différents muqueuses : respiratoire, digestive…
Elle fonctionne comme un canal qui permet l’échange d’ions chlorures entre l’intérieur et l’extérieur de la cellule.
Lorsque son gène est muté, le canal dysfonctionne.
Par le biais de différentes cascades biologiques, il en résulte notamment une diminution de l’eau excrétée au niveau des muqueuses et, en conséquence, une inflammation et un épaississement du mucus qui le recouvre.
L'identification directe du gène et de ses différentes mutations est possible depuis 1989. Le gène CF (CF pour Cystic Fibrosis) est un grand gène de 250 kilo-bases qui code pour une protéine de 1480 acides aminés appelée protéine CFTR.
Le gène CFTR peut être porteur de nombreuses mutations : près de 2 000 altérations différentes du gène ont été identifiées. Parmi elles, la mutation Delta F508 est la plus fréquente : elle est présente chez 70 % des malades sous forme hétérozygote (une seule copie), et chez 50 % d’entre eux sous forme homozygote (deux copies).
Mutation de classe 2 : mutations perturbant le processus de maturation cellulaire de la protéine. De nombreuses mutations altèrent la maturation de la protéine et son ciblage vers la membrane plasmique. Ainsi, la protéine est soit absente, soit présente en quantité réduite dans la membrane apicale. Les mutations de cette classe représentent la majorité des allèles CF.
L’examen des arbres généalogiques familiaux permet de connaître les modes de transmission héréditaire des déterminants génétiques responsables.
Il existe à proximité du gène CF une région non codante où se trouvent des sites de restriction (coupure par des enzymes de restriction) reconnus par l'enzyme Taq I.
L'allèle fonctionnel est lié à 4 sites de restriction tandis que l'allèle morbide est lié à 3 sites de restriction.
On dispose d'une sonde XV2C radioactive capable de s'hybrider à ce locus avec les fragments de restriction (chacun d'eux est exprimé en kilobases (kb).
La technique du Southern-blot permet de révéler pour chaque individu la présence de tel ou tel fragment de restriction au locus XV2C et donc d’identifier quel allèle est présent
La technique du Southern-blot permet de révéler pour chaque individu la présence de tel ou tel fragment de restriction au locus XV2C. Principales étapes de cette technique :
1. l’ADN est digéré par l'enzyme de restriction Taq I.
2. Les fragments de restriction sont séparés par électrophorèse puis sont mis sous forme simple brin.
3. La sonde radioactive va s'hybrider avec les fragments qui comportent au moins une partie complémentaire avec elle.
4. Après lavage, l'autoradiographie révèle les fragments de restriction qui se sont hybridés avec la sonde radioactive XV2C pour différents individus de cette famille
La thérapie génique est une stratégie qui consiste à faire pénétrer des gènes dans les cellules d'un patient pour traiter une maladie.
Le virus vecteur infecte les cellules épithéliales bronchiques cibles
Le gène CFTR s’intègre au génome des cellules bronchiques
Thérapie génique à base d'un vecteur adénovirus (virothérapie).
Un nouveau gène est inséré dans un vecteur dérivé d'un adénovirus, lequel est utilisé pour introduire l'ADN modifié dans une cellule humaine. Si le transfert se déroule correctement, le nouveau gène élaborera une protéine fonctionnelle qui pourra alors exprimer son potentiel thérapeutique.
L'éventail des vecteurs est large :
• Les vecteurs intégratifs, comme les rétrovirus et les lentivirus, permettent d'insérer un gène thérapeutique dans l'ADN de l'hôte, garantissant ainsi son maintien dans les cellules filles après divisions.
• Les vecteurs non intégratifs (adénovirus, AAV) permettent au contraire d'éviter l'intégration aléatoire du gène dans l'ADN de l'hôte.
• D'autres essais sont tentés avec de l'ADN nu, directement injecté dans l'organisme.
in vivo : Pour les maladies musculaires, respiratoires, oculaires, cardiaques ou neurologiques, le transfert du gène se fait in vivo, par injection du gène vectorisé directement dans l’organisme ou dans l’organe à traiter, comme un médicament. De nombreux essais cliniques sont en cours avec cette technique et plusieurs produits ont atteint le stade de la mise sur le marché (Glybera, Luxturna).
exvivo : - mieux contrôler les étapes
- utiliser moins de vecteurs
- éviter la dispersion du traitement dans des organes non ciblés.
Solution plus souvent utilisée pour le traitement des maladies sanguines, car il est possible de prélever les cellules à corriger par une simple prise de sang.
Le premier médicament ex vivo (Strimvelis, 2016) correspond à des cellules hématopoïétiques CD34+ prélevées à des patients atteints d’un déficit immunitaire sévère (ADA-DICS).
Utiliser des virus génétiquement modifiés pour tuer des cellules cancéreuses
Ces virus sont appelés oncolytiques. Ils sont modifiés génétiquement pour infecter spécifiquement les cellules tumorales qu’ils détruisent. Un premier virus oncolytique, issu d’une souche d’herpès, a obtenu une autorisation de mise sur le marché en 2015 (Imlygic). Il est indiqué dans le traitement du mélanome
Produire des cellules thérapeutiques par thérapie génique
Pour certaines pathologies complexes, il n’y a pas un gène unique à réparer ou à remplacer. Mais il est possible de concevoir des stratégies indirectes : en associant thérapie cellulaire et thérapie génique, on peut obtenir des cellules qui possèdent de nouvelles propriétés thérapeutiques.
Modifier l’ARN pour obtenir une protéine fonctionnelle
Cette technique consiste à faire produire par la cellule une version modifiée de la protéine qui lui fait défaut. Cela nécessite l’injection de petits oligonucléotides (Courts segments d’acides nucléiques ARN ou ADN) anti-sens qui se fixent sur l’ARN messager transcrit à partir du gène muté et en modifient l’épissage, une étape importante avant sa traduction en protéine.
Dans la maladie de Duchenne, causée par des mutations dans le gène de la dystrophine, les approches de « saut d’exon » consistent à faire omettre les séquences du gène qui portent la mutation. On obtient une dystrophine plus courte que la protéine normale, mais fonctionnelle.
Dans l’amyotrophie spinale, l’approche est de bloquer un site inhibiteur d’épissage, afin de « réinclure » un exon dans l’ARN pour obtenir une forme normale du gène SMN2.
Eliminer ou réparer un gène altéré directement dans la cellule
Cette technique, appelée édition génomique permet de réparer des mutations génétiques de façon ciblée. Elle nécessite d’importer plusieurs outils dans la cellule :
des enzymes spécifiques (nucléases) qui vont couper le génome là où c’est nécessaire
un segment d’ADN qui sert à la réparation du génome et permettra de retrouver un gène fonctionnel
Parmi ces outils, on trouve les nucléases à doigt de zinc, les TALEN et surtout les outils CRISPR. Ces approches sont encore très expérimentales, mais la révolution apportée par la simplicité du système CRISPR suscite des espoirs extrêmement importants. Plusieurs essais cliniques sont déjà en cours aux Etats-Unis et en Chine.
Génomique : Étude conduite à l’échelle du génome, portant sur le fonctionnement de l’organisme, d’un organe, d’une pathologie…
Nucléases : Enzyme capable de couper des acides nucléiques au niveau des liaisons phosphodiesters.
Les vecteurs, clés du succès de la thérapie ex vivo et in vivo
Une des difficultés associées au développement de la thérapie génique est qu’il faut faire pénétrer un acide nucléique à visée thérapeutique dans les cellules d’un patient.
Les vecteurs viraux :
intégratifs : l’ADN du vecteur viral s’intègre dans l’ADN de l’hôte => se reporduit avec celle-ci => modifie le génôme. Ex : vecteurs lentiviraux, dérivés de virus humains comme le VIH rendus inoffensifs.
non intégratifs : le gène thérapeutique demeure dans la cellule sans s’intégrer au génome de l’hôte => meurt avec la cellule hôte. Ex : vecteurs dérivés de virus adéno-associés (ou AAV).
Les vecteurs non viraux :
l’injection directe d’ADN, modifié et protégé des nucléases grâce à des modifications chimiques, ou intégré dans un plasmide.
La lipofection : le gène thérapeutique est associé à des lipides cationiques qui favorisent son entrée dans la cellule hôte.
l’électroporation ou la nucléofection, par application d’un champ électrique, sont très utilisés, notamment pour la délivrance des protéines et oligonucléotides du système CRISPR pour des approches ex vivo,
Video : https://youtu.be/OoAJqxxSRgY
Site dédié : https://www.vaincrelamuco.org/
exercice en ligne : http://svt.tice.ac-orleans-tours.fr/php5/publis/genetique/mucovisc.htm
Maladie génétique : un gène est défectueux ≠ gène de susceptibilité
Thérapie génique : modifier ou remplacer le gène défectueux