« À
la limite, la vie, c'est ce qui
est capable d'erreur. Et c'est peut-être à cette donnée ou plutôt
à cette éventualité fondamentale qu'il faut demander compte du
fait que la question de l'anomalie traverse de part en part toute la
biologie. À elle aussi qu'il faut demander compte des
mutations et des processus évolutifs qu'elle induit. À elle
qu'il faut demander compte de cette mutation singulière, de cette «
erreur héréditaire »
qui fait que la vie a abouti avec l'homme à un vivant qui ne se
trouve jamais tout à fait à sa place, à un vivant voué à
« errer » et destiné finalement à l'« erreur ». Et si on admet
que le concept, c'est la réponse que la vie elle-même donne
à cet aléa, il faut convenir que l'erreur est à la racine de ce
qui fait la pensée humaine et son histoire. L'opposition du vrai et
du faux, les valeurs qu'on prête à l'un et à l'autre, les effets
de pouvoir que les différentes sociétés et les différentes
institutions lient à ce partage, tout cela même n'est
peut-être que la réponse la plus 1 tardive
à cette possibilité d'erreur intrinsèque à la vie. Si l'histoire
des sciences est discontinue, c'est-à-dire si on ne peut l'analyser
que comme une série de « corrections », comme
une distribution nouvelle du vrai et du faux qui ne libère jamais
enfin et pour toujours la vérité, c'est que, là encore, l' «
erreur » constitue non pas
l'oubli ou le retard d'une vérité, mais la dimension propre à la
vie des hommes et au temps de l'espèce. » FOUCAULT,Dits
et Ecrits(1978) sujet BAC philo TS métropole juin 2017.