Les personnes atteintes de tumeurs cérébrales présentent une gamme de
symptômes dont la gravité peut varier, allant de maux de tête à un
déclin des fonctions cognitives. Les symptômes dépendent du type de
tumeur, de sa taille, de son emplacement et de son rythme de croissance.
Comprendre ce qui contrôle la vitesse de croissance des tumeurs
cérébrales pourrait donc aider à mettre au point des traitements qui
ralentissent la progression du cancer et améliorent la qualité de vie
des patients. Trois équipes rapportent aujourd’hui dans une série
d’articles publiés dans Nature que, dans le cerveau, les
cellules cancéreuses forment avec les neurones des connexions, ou
synapses, et que cette connexion favorise la croissance tumorale.
https://www.pourlascience.fr/theme/cancer/liaisons-dangereuses-les-cellules-tumorales-forment-des-synapses-avec-les-neurones-18093.php?fbclid=IwAR3Q8AYDA9DZnL_07iRnCUaOHFxnASQD5EWpOFsDhvX11RzWV4sI82ILIPQ
Une synapse est une structure dans laquelle deux neurones adjacents
communiquent en utilisant des molécules de neurotransmetteur,
habituellement le glutamate. La libération de glutamate par le neurone
présynaptique active les récepteurs de glutamate, appelés récepteurs
AMPA et récepteurs NMDA, sur le neurone postsynaptique. L’activation des
récepteurs provoque le passage d’ions à travers la membrane cellulaire,
ce qui produit une dépolarisation – une augmentation de la charge
positive à l’intérieur du neurone postsynaptique, qui entraîne une
excitation. D’autres types de cellules, les cellules gliales, entourent
la synapse et régulent la transmission du signal en éliminant le
neurotransmetteur libéré. Certaines cellules gliales affectent
« l’excitabilité » du neurone en régulant la concentration des ions
potassium à l’extérieur de la cellule.
Les cellules gliales peuvent donner naissance à un type de tumeur
cérébrale appelée « gliome », qui est la principale cause de décès par
cancer du cerveau aux États-Unis. Une caractéristique commune à de
nombreux types de gliomes est que leur croissance nécessite l’activité
des cellules neuronales voisines, mais on ignorait pourquoi jusqu’à
présent.
Les cellules gliales saines forment des réseaux cellulaires
interconnectés. En effet, des structures sur la membrane des cellules
gliales, appelées « jonctions interstitielles », permettent aux
molécules de signalisation, comme les ions calcium, de se déplacer dans
les cellules gliales voisines. Les cellules de gliome forment également
des réseaux cellulaires interconnectés par des jonctions interstitielles
appelées microtubules tumoraux – de longues et fines protubérances de
la membrane cellulaire qui s’étendent dans les tissus environnants et
contribuent à l’infiltration et à la prolifération de la tumeur.
Varun Venkataramani, de l’Institut d’anatomie et de biologie
cellulaire de l’université de Heidelberg, et ses collègues ont examiné
par microscopie électronique des microtubules tumoraux formés par des
gliomes humains qui avaient été transplantés dans le cerveau de souris.
Ils ont remarqué que ces microtubules présentent à leur extrémité un
épaississement caractéristique des synapses excitatrices, appelé densité
postsynaptique, où se trouvent habituellement les récepteurs du
glutamate. Dans les neurones voisins, adjacents à ces densités
postsynaptiques, les chercheurs ont observé des amas de vésicules qui
stockent des neurotransmetteurs, qui sont une caractéristique d’une
région présynaptique d’un neurone. L’équipe de Humsa Venkatesh, du
département de neurologie de l’université de Californie à Stanford, a
observé des structures similaires entre des cellules de gliome et des
neurones.
Les deux équipes ont montré que les gènes des récepteurs du glutamate
et des composants structuraux de la région postsynaptique sont exprimés
dans une partie des cellules des gliomes humains, ce qui suggère que
les cellules gliomes exploitent les mêmes mécanismes moléculaires que
les neurones pour établir des synapses. Pour déterminer si ces synapses
entre les cellules tumorales et les neurones fonctionnent de la même
manière que celles reliant les neurones, les deux groupes ont
transplanté des cellules de gliome humain dans le cerveau de souris. La
stimulation des neurones proches des cellules de gliome a provoqué une
brève dépolarisation dans certaines de ces dernières ; dépolarisation
caractéristique des synapses excitatrices et qui mettait en jeu les
récepteurs AMPA. Fait intéressant, le type de récepteur AMPA exprimé
dans ces cellules de gliome a des propriétés pharmacologiques
différentes de celles des récepteurs AMPA exprimés dans les neurones, ce
qui en fait un candidat prometteur comme cible thérapeutique. Dans
certaines autres cellules de gliome, les biologistes ont observé un
courant dépolarisant de longue durée qui s’amplifiait et se propageait à
travers les jonctions interstitielles vers les cellules tumorales
connectées. Ce courant prolongé n’était pas d’origine synaptique, mais
semblait plutôt provenir de changements dans la concentration
extracellulaire en ions potassium en raison de l’activité neuronale.
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