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Des bactéries pour combattre l'obésité ?
La flore intestinale de personnes minces,
transférée à des souris, les protège de l’obésité. De quoi envisager une
nouvelle stratégie de prévention de l’obésité ?
Marie-Neige Cordonnier
Pourquoi, chez certaines jumelles, l'une est obèse et l'autre
non ? Une étude où les microbiotes de telles jumelles ont été
transplantés dans l'intestin de souris suggèrent que le microbiote de la
jumelle mince la protège de l'obésité.
©Shutterstock/ollyy
Depuis quelques années, la communauté scientifique s’est prise d’un
vif engouement pour l’étude du microbiote, c'est-à-dire l’ensemble des
bactéries qui composent notre flore intestinale. Et pour cause. On
s’aperçoit qu’il est impliqué dans nombre de processus physiologiques
humains : tolérance alimentaire, protection contre des agents pathogènes, équilibre intestinal, obésité, diabète, inflammations chroniques de l’intestin. Il y a une semaine encore, des biologistes montraient que la diversité du microbiote influe sur le risque de développer des complications chez les individus obèses. C’est à présent le rôle de la flore intestinale dans le développement de l’obésité elle-même qui est précisé.
Une équipe internationale dirigée par Jeffrey Gordon, de l’École de médecine de l’Université de Washington, aux États-Unis, vient de montrer que, introduit chez la souris, le microbiote d’une personne obèse rend l’animal obèse, contrairement au microbiote d’une personne mince. Sauf dans un cas : quand une souris ayant reçu le microbiote d’une personne obèse absorbe ensuite celui d’une personne mince et suit un régime peu calorique, elle ne grossit pas.
Pour que les situations soient les plus comparables possibles, les biologistes sont partis de femmes jumelles adultes dont l’une était obèse et l’autre non (et ce, pour quatre paires de jumelles). Ils ont transféré le microbiote de chaque jumelle dans l’intestin de souris stériles, sans microbiote ni aucun germe (les souris ont été prélevées in utero, maintenues dans une enceinte stérile et nourries avec du lait stérilisé, puis des aliments solides stérilisés). Les souris qui avaient reçu le microbiote de la jumelle obèse ont grossi, contrairement aux autres.
Était-ce le microbiote provenant de la personne obèse qui causait l’obésité ou, au contraire, celui de la personne mince qui protégeait de l’obésité ? Pour le savoir, les biologistes ont fait cohabiter de nouvelles souris portant chacune le microbiote d'une des jumelles. En groupe, les souris ont l’habitude de manger les matières fécales de leurs congénères et, par conséquent, d’ingérer leur microbiote. La cohabitation débutait dès la stabilisation de leur flore intestinale, cinq jours après l’inoculation des microbiotes humains. Après dix jours de cohabitation, les souris portant le microbiote de la jumelle obèse n’avaient pas grossi et leur microbiote avait été colonisé par celui de leurs congénères, provenant de la jumelle mince. Toutefois, ce n’était le cas que lorsque leur régime alimentaire était riche en fibres et pauvre en graisses. Dans le cas contraire, leur microbiote n’était pas colonisé et elles devenaient obèses. En revanche, la cohabitation est restée sans effet sur les souris ayant reçu le microbiote de la jumelle mince : leur microbiote n’a pas été colonisé par celui provenant de la jumelle obèse, et elles sont restées minces.
Qu’en conclure ? Plusieurs choses. D’une part, que le microbiote de la jumelle mince protège les souris de celui de la jumelle obèse. D’autre part, que le microbiote de la jumelle mince peut « l’emporter » contre le microbiote de la jumelle obèse, à condition que la souris qui porte ce dernier suive un régime adéquat. Que signifient ces résultats pour l’homme ? Ils suggèrent que le microbiote des personnes minces les protège de l’obésité. Et qu’il sera peut-être possible, un jour, de prémunir contre l’obésité par un régime adéquat et l’injection d’un cocktail de bactéries conçu à partir du microbiote de personnes minces.
« Ces travaux sont importants » explique Philippe Gérard, chercheur au sein de l’Institut Micalis (Microbiologie de l’alimentation au service de la santé, INRA/AgroParisTech), à Jouy-en-Josas. « S’il avait déjà été montré que certains microbiotes favorisent le développement de l’obésité, pour la première fois il est montré qu’un microbiote protecteur peut prendre le dessus et, en association avec un régime alimentaire adéquat, empêcher un microbiote obésogène d’induire une prise de poids. S’il reste beaucoup à apprendre (quelles bactéries impliquées ? Par quels mécanismes ?), ces travaux ouvrent la possibilité que, dans le futur, un apport de bactéries protectrices constitue une nouvelle voie thérapeutique pour la prévention ou le traitement de l’obésité. »
Quant au rôle de la flore intestinale dans la prise de poids, il reste à déterminer. Néanmoins, les biologistes ont relevé une différence fonctionnelle entre les deux types de microbiotes transplantés. Le microbiote coupe et fermente des glucides complexes, issus de l’alimentation et non digérés par l’hôte, en acides gras dits volatils (acétate, propionate, butyrate) qui contribuent aux apports énergétiques de l’hôte. Transplanté chez une souris, le microbiote d’une personne mince produisait plus d’acides gras volatils et digérait plus de résidus que celui d’une personne obèse. La prise de poids des souris obèses serait-elle liée à ce déficit en acides gras volatils, impliqués par ailleurs dans la régulation de la satiété et de l’accumulation des graisses dans les tissus ?
Une équipe internationale dirigée par Jeffrey Gordon, de l’École de médecine de l’Université de Washington, aux États-Unis, vient de montrer que, introduit chez la souris, le microbiote d’une personne obèse rend l’animal obèse, contrairement au microbiote d’une personne mince. Sauf dans un cas : quand une souris ayant reçu le microbiote d’une personne obèse absorbe ensuite celui d’une personne mince et suit un régime peu calorique, elle ne grossit pas.
Pour que les situations soient les plus comparables possibles, les biologistes sont partis de femmes jumelles adultes dont l’une était obèse et l’autre non (et ce, pour quatre paires de jumelles). Ils ont transféré le microbiote de chaque jumelle dans l’intestin de souris stériles, sans microbiote ni aucun germe (les souris ont été prélevées in utero, maintenues dans une enceinte stérile et nourries avec du lait stérilisé, puis des aliments solides stérilisés). Les souris qui avaient reçu le microbiote de la jumelle obèse ont grossi, contrairement aux autres.
Était-ce le microbiote provenant de la personne obèse qui causait l’obésité ou, au contraire, celui de la personne mince qui protégeait de l’obésité ? Pour le savoir, les biologistes ont fait cohabiter de nouvelles souris portant chacune le microbiote d'une des jumelles. En groupe, les souris ont l’habitude de manger les matières fécales de leurs congénères et, par conséquent, d’ingérer leur microbiote. La cohabitation débutait dès la stabilisation de leur flore intestinale, cinq jours après l’inoculation des microbiotes humains. Après dix jours de cohabitation, les souris portant le microbiote de la jumelle obèse n’avaient pas grossi et leur microbiote avait été colonisé par celui de leurs congénères, provenant de la jumelle mince. Toutefois, ce n’était le cas que lorsque leur régime alimentaire était riche en fibres et pauvre en graisses. Dans le cas contraire, leur microbiote n’était pas colonisé et elles devenaient obèses. En revanche, la cohabitation est restée sans effet sur les souris ayant reçu le microbiote de la jumelle mince : leur microbiote n’a pas été colonisé par celui provenant de la jumelle obèse, et elles sont restées minces.
Qu’en conclure ? Plusieurs choses. D’une part, que le microbiote de la jumelle mince protège les souris de celui de la jumelle obèse. D’autre part, que le microbiote de la jumelle mince peut « l’emporter » contre le microbiote de la jumelle obèse, à condition que la souris qui porte ce dernier suive un régime adéquat. Que signifient ces résultats pour l’homme ? Ils suggèrent que le microbiote des personnes minces les protège de l’obésité. Et qu’il sera peut-être possible, un jour, de prémunir contre l’obésité par un régime adéquat et l’injection d’un cocktail de bactéries conçu à partir du microbiote de personnes minces.
« Ces travaux sont importants » explique Philippe Gérard, chercheur au sein de l’Institut Micalis (Microbiologie de l’alimentation au service de la santé, INRA/AgroParisTech), à Jouy-en-Josas. « S’il avait déjà été montré que certains microbiotes favorisent le développement de l’obésité, pour la première fois il est montré qu’un microbiote protecteur peut prendre le dessus et, en association avec un régime alimentaire adéquat, empêcher un microbiote obésogène d’induire une prise de poids. S’il reste beaucoup à apprendre (quelles bactéries impliquées ? Par quels mécanismes ?), ces travaux ouvrent la possibilité que, dans le futur, un apport de bactéries protectrices constitue une nouvelle voie thérapeutique pour la prévention ou le traitement de l’obésité. »
Quant au rôle de la flore intestinale dans la prise de poids, il reste à déterminer. Néanmoins, les biologistes ont relevé une différence fonctionnelle entre les deux types de microbiotes transplantés. Le microbiote coupe et fermente des glucides complexes, issus de l’alimentation et non digérés par l’hôte, en acides gras dits volatils (acétate, propionate, butyrate) qui contribuent aux apports énergétiques de l’hôte. Transplanté chez une souris, le microbiote d’une personne mince produisait plus d’acides gras volatils et digérait plus de résidus que celui d’une personne obèse. La prise de poids des souris obèses serait-elle liée à ce déficit en acides gras volatils, impliqués par ailleurs dans la régulation de la satiété et de l’accumulation des graisses dans les tissus ?
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