Facebook : le « like », monnaie de l'affect et de l'ego
La fonction « like » sur Facebook est devenu
un moyen d'autopromotion. Il permet aussi de se donner bonne conscience
lorsqu'on plébiscite de nobles causes.
Sébastien Bohler
Sur Facebook, les amitiés et les réputations se font à coups de «
like ». D'un clic, on signale son adhésion à un message, son soutien,
son "amitié" pour une personne ou un groupe de personnes. Le like
est devenu l'unité principale de réputation, celle qui reflète votre
valeur dans ce miroir changeant qu'est le réseau, et votre cote dans ce
que le psychologue Carlo Strenger appelle la « Bourse du moi ».
Pas étonnant, donc, si se développe actuellement une industrie du like. On y trouve des vendeurs de like, des vendeurs de réputation, de cote ou de désirabilité, si vous voulez. Ils ont leur site internet, leur vidéo de présentation, et ils sont très sérieux, comme ils le disent ici.
Traduction : « Sur Buyfansnow (Achetez des fans maintenant), nous sommes fiers de fournir à nos clients les fans et les followers de la plus haute qualité. Ne vous laissez pas berner par des offres apparemment moins chères mais qui vous donnent des fans de moindre qualité par des techniques de SPAM. » Les fans ont donc une valeur plus ou moins élevée à la bourse du moi. Mais cela ne vaut que lorsque vous voulez faire appel à des professionnels pour obtenir des like. Dans le cas contraire, vous pouvez recourir à des ruses de geek pour créer vous même des autolike. « S'auto-liker », c'est s'attribuer à soi-même une valeur enflée, acte narcissique et trompeur par excellence. Il s'agit cette fois de doper sa propre image. La pratique est si répandue que si l'on recherche les termes « autolike » et « Facebook » sur Google, on obtient environ 38 millions de résultats. L’humanité passe une partie de son temps à trouver des astuces pour s’autocongratuler. Belle leçon de philosophie. Comme aurait dit La Rochefoucauld, « l'amour-propre est le plus grand des flatteurs ».
Quand le like produit le slacktivisme
Mais l’actualité de Facebook, c’est encore autre chose. Parlons pour cette fois de ce qui se passe quand vous likez par exemple un groupe Facebook de soutien à des œuvres caritatives. C’est ce qu’on appelle le slacktivisme, un néologisme dérivé de l’activisme, mais sur la toile. Les Américains ont commencé à s’interroger sur l’efficacité des soutiens à de grandes causes sur des réseaux sociaux. Quelle est la vraie efficacité de l'activisme virtuel, comparé à l'activisme réel. Micah White, un des initiateurs du mouvement Occupy Wall Street, livrait ainsi ses réflexions sur le sujet (il utilise quant à lui le terme de clicktivism).
Dans cet extrait, il explique notamment que dans une expérience réalisée sur Internet, la quantité de clics pour partager un message militant diminuait lorsque le message était précis, et augmentait lorsqu'il devenait vague, semblable à une annonce publicitaire, pour perdre finalement tout son contenu idéologique.
Plus récemment, une étude de Kirk Kristofferson et ses collègues de l'Université de Colombie Britannique a révélé que, lorsque nous « likons » une cause humanitaire, nous donnons moins d’argent réel pour soutenir les gens. Et ce, tout particulièrement lorsqu’on donne son like devant tout le beau monde rassemblé sur la toile. Le fait de se présenter aux yeux de tous comme un défenseur de la vertu, rehausse l'image que nous avons de nous-même, et nous donne bonne conscience. En ce sens, le slacktivisme est un danger insidieux, qui permet à chacun de laver sa conscience d'un clic, à peu de frais. Une version électronique et moderne des bonnes actions, elle aussi virtuelle.
Pas étonnant, donc, si se développe actuellement une industrie du like. On y trouve des vendeurs de like, des vendeurs de réputation, de cote ou de désirabilité, si vous voulez. Ils ont leur site internet, leur vidéo de présentation, et ils sont très sérieux, comme ils le disent ici.
Traduction : « Sur Buyfansnow (Achetez des fans maintenant), nous sommes fiers de fournir à nos clients les fans et les followers de la plus haute qualité. Ne vous laissez pas berner par des offres apparemment moins chères mais qui vous donnent des fans de moindre qualité par des techniques de SPAM. » Les fans ont donc une valeur plus ou moins élevée à la bourse du moi. Mais cela ne vaut que lorsque vous voulez faire appel à des professionnels pour obtenir des like. Dans le cas contraire, vous pouvez recourir à des ruses de geek pour créer vous même des autolike. « S'auto-liker », c'est s'attribuer à soi-même une valeur enflée, acte narcissique et trompeur par excellence. Il s'agit cette fois de doper sa propre image. La pratique est si répandue que si l'on recherche les termes « autolike » et « Facebook » sur Google, on obtient environ 38 millions de résultats. L’humanité passe une partie de son temps à trouver des astuces pour s’autocongratuler. Belle leçon de philosophie. Comme aurait dit La Rochefoucauld, « l'amour-propre est le plus grand des flatteurs ».
Quand le like produit le slacktivisme
Mais l’actualité de Facebook, c’est encore autre chose. Parlons pour cette fois de ce qui se passe quand vous likez par exemple un groupe Facebook de soutien à des œuvres caritatives. C’est ce qu’on appelle le slacktivisme, un néologisme dérivé de l’activisme, mais sur la toile. Les Américains ont commencé à s’interroger sur l’efficacité des soutiens à de grandes causes sur des réseaux sociaux. Quelle est la vraie efficacité de l'activisme virtuel, comparé à l'activisme réel. Micah White, un des initiateurs du mouvement Occupy Wall Street, livrait ainsi ses réflexions sur le sujet (il utilise quant à lui le terme de clicktivism).
Dans cet extrait, il explique notamment que dans une expérience réalisée sur Internet, la quantité de clics pour partager un message militant diminuait lorsque le message était précis, et augmentait lorsqu'il devenait vague, semblable à une annonce publicitaire, pour perdre finalement tout son contenu idéologique.
Plus récemment, une étude de Kirk Kristofferson et ses collègues de l'Université de Colombie Britannique a révélé que, lorsque nous « likons » une cause humanitaire, nous donnons moins d’argent réel pour soutenir les gens. Et ce, tout particulièrement lorsqu’on donne son like devant tout le beau monde rassemblé sur la toile. Le fait de se présenter aux yeux de tous comme un défenseur de la vertu, rehausse l'image que nous avons de nous-même, et nous donne bonne conscience. En ce sens, le slacktivisme est un danger insidieux, qui permet à chacun de laver sa conscience d'un clic, à peu de frais. Une version électronique et moderne des bonnes actions, elle aussi virtuelle.
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