LA
FAUVETTE A TETE NOIRE, UNE NOUVELLE ESPECE ?
L’apparition
d’une nouvelle espèce, c’est la spéciation. Ce phénomène ;
développé par Ernst Mayr ; ne se produit pas instantanément.
Même si elle résulte surtout de la sélection naturelle et de la
dérive génétique, la spéciation est aussi due à une variation
aléatoire des individus au cours du temps au sein d’une même
population (ou espèce). Elle se divisera par la suite en deux
espèces à part entière à partir du moment où elles seront
non-interfécondes entre elles, c’est-à-dire isolées sur le plan
de la reproduction. Cet isolement reproductif provient d’un
isolement éthologique (mâles et femelles ne perçoivent plus les
signaux sexuels comme les parades, phéromones ou les chants émis
par leur partenaire ce qui les empêche de se rejoindre), l’isolement
gamétique et mécanique (quand il n’y a plus fécondation et quand
les organes reproducteurs ne sont plus compatibles), puis l’isolement
écologique (quand les espèces cessent de fréquenter le même
milieu). Il existe des cas où surviennent des hybrides mais ceux-ci
vivent peu longtemps et sont pour la plupart stériles. Pour ceux qui
sont encore fertiles, leurs descendants, eux, sont stériles.
L’apparition
d’une nouvelle espèce est complexe et longue mais certaines
actions de l’Homme et la compétition intraspécifique peuvent
aider. D’une part, les actions de l’Homme modifient
perpétuellement les écosystèmes. Elles peuvent détruire ou
entretenir la diversité biologique mais elles peuvent aussi générer
cette diversité et donc contribuer à l’apparition de nouvelles
espèces. D’autre part, la compétition intraspécifique peut elle
aussi aider à l’apparition de nouvelles espèces. Elle suggère
une certaine concurrence au sein d’une même population, ou espèce,
pour une ressource commune du fait du nombre d’individus et/ou de
la limitation de cette ressource.
La
fauvette à tête noire est un petit oiseau mesurant environ 14 cm de
long, d’une envergure de 20 à 23 cm et pèse entre 16 et 35
grammes. Cet oiseau est une espèce de Passereau de la famille des
Sylviidae, il est très commun dans les régions qu’il habite mais
reconnaissable par son chant mélodieux auquel le mâle peut ajouter
des imitations d’autres oiseaux. Le mâle a le dessus de la tête
noire, la femelle l’a de couleur rousse et les deux ont le corps
gris-brun. On trouve cet oiseau un peu partout mais surtout dans
les zones boisées ; dans des bois de feuillus, bosquets, haies,
jardins et parcs et même en ville. Il vit en Afrique du nord
(Maghreb) en Eurasie jusqu’en Sibérie occidentale et dans les îles
de l’Atlantique. Les fauvettes à tête noire se nourrissent de
baies et de petits fruits se situant à mi-hauteur comme les baies de
sureau, l’épine-vinette, les olives ou encore le lierre ainsi que
le troène. Pendant la saison des reproductions, le mâle construit
des ébauches de nids avec des herbes sèches et la femelle choisira
d’en finir un avec du duvet et de la laine. La femelle peut aller
jusqu’à deux couvées allant de 3 à 5 œufs par saison.
Ces oiseaux sont
partiellement migrateurs. Les oiseaux vivant vers le nord migrent en
Afrique tropicale alors que ceux vivant plus proche de la
Méditerranée peuvent être sédentaires. Mais ces oiseaux ont
changés leurs habitudes de migrations. En effet, les Hommes ont pris
l’habitude, pour une majorité, de nourrir les oiseaux en hiver en
laissant toutes sortes de graines dans des assiettes par terre ou
dans des mangeoires. De ce fait, les oiseaux sont incités à rester
ou à migrer vers ces pays où il est facile de trouver de la
nourriture un peu partout. Pour le cas des fauvettes à tête noire,
certains ont gardés leurs habitudes et migrent vers les pays
d’Afrique, en Espagne et au Portugal alors que les autres, elles,
ont changé leurs habitudes et ont décidés de migrer vers ces pays
où l’Homme les nourrit en hiver comme en Grande Bretagne, ou elles
ne migrent plus.
Cette
situation engendre certaines modifications sur ces oiseaux.
Premièrement, nous pouvons observer une différence de la taille des
ailes de certaines fauvettes à tête noire. La Grande Bretagne étant
plus proche de l’Europe centrale que l’Afrique ou l’Espagne,
les fauvettes y allant ont des ailes plus rondes et moins longues que
celles des fauvettes allant vers le sud, ce qui leur confère une
meilleure maniabilité mais elles sont moins adaptées aux longs
vols. Deuxièmement, les fauvettes migrant vers le nord possèdent un
bec plus long et étroit qui leur permet de manger la nourriture qui
leur est donné ; au contraire des fauvettes se dirigeant vers
le sud qui ont un bec plus large leur permettant de manger les fruits
disponibles comme les olives d’Espagne. Dernièrement, la migration
vers le nord étant plus courte que celle vers le sud, les fauvettes
allant vers le nord reviennent plus tôt que celles parties dans le
sud. Etant les premières revenues, elles commencent à se reproduire
entre elles sans attendre les autres ; cela a conduit à une
non-interfécondité entre ces deux groupes de fauvettes en moins de
30 générations même s’ils continuent à vivre côte à côte.
Ce
changement des habitudes de migrations des fauvettes à tête noire
et la non-interfécondité entre les deux groupes d’oiseaux
provoque un certain isolement génétique qui pourrait conduire à
une spéciation chez les fauvettes. Même si ces deux groupes ont
développé des traits bien distincts du fait et adapté à leurs
habitats différents, il n’est pas certain qu’ils se sépareront
en deux espèces car pour cela il faudrait que les Hommes gardent le
même comportement pendant encore quelques décennies, alors que la
nature de l’Homme veut que ses habitudes changent au cours du
temps. Quoi qu’il arrive, ces résultats alimentent le long débat
sur la nécessité ou non de la séparation géographique pour
l’apparition d’une nouvelle espèce.
Cette
étude faite par des chercheurs Allemands de l’université de
Fribourg illustre bien comment les actions humaines peuvent avoir un
impact sur l’évolution du monde vivant. Comme le dit Martin
Schaefer « c’est un bel exemple de la rapidité de
l’évolution », « c’est quelque chose que nous
pouvons voir de nos propres yeux. Il n’y a pas besoin d’attendre
des millions d’années. ».
Informations
et images trouvées sur :
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire